Lorsque nous pensons à l'été, nous nous imaginons souvent à la plage, en train de nous détendre sur le sable en écoutant le bruit relaxant de la mer. Mais les plages ne sont pas seulement des lieux de détente : elles sont aussi des habitats essentiels pour de nombreuses espèces. C'est pourquoi la préservation de nos plages dans leur état naturel est un sujet si important, que nous allons aborder plus en détail.
C’est quoi une « Plage naturelle » ?
Une plage dite «naturelle » est un espace côtier où le sable, les cailloux, la végétation, les algues et autres matières organiques sont laissés dans leur état naturel, avec très peu ou pas d'intervention humaine. Les plages naturelles soutiennent la biodiversité locale, offrent un habitat à de nombreuses espèces, et permettent aux gens de découvrir les merveilles de cet écosystème.
De plus en plus de gens reconnaissent qu'une plage attrayante est un lieu vivant qui soutient la biodiversité et qui invite à explorer ses merveilles naturelles.
Des écosystèmes dynamiques
Dans notre région, la composition des plages varie, allant de zones sablonneuses à des sections de cailloux ou de roches de différentes tailles. Ce sont des écosystèmes dynamiques qui peuvent varier de forme et d’épaisseur selon la saison ou d'une année à l'autre en raison de facteurs tels que les conditions météorologiques, les courants marins littoraux, tout particulièrement lors des tempêtes, surtout lorsque la marée est haute.
Le mouvement des sédiments est nécessaire pour garder ces milieux équilibrés. Par exemple, les plages se font de plus en plus rares, en partie à cause de l’enrochement des terrains côtiers pour se protéger contre les tempêtes et la hausse du niveau de la mer. L'enrochement bloque le mouvement naturel des sédiments et du sable, essentiel à la régénération des plages, et réduit l’habitat de nombreuses espèces côtières.
Bien que dans notre région nous retrouvons des longues étendues de plages sablonneuses, certaines plages sont plutôt rocheuses où on y retrouve aussi de la laisse de mer.
L’érosion, un processus naturel
L'érosion côtière se produit lorsque les vagues, les marées, les vents et les courants littoraux rongent les rives, notamment les plages, dunes et marais qu’on peut retrouver le long du littoral. Ce processus naturel déplace le sable entre les barres littorales, la plage et les dunes selon les saisons.
En présence d'un courant de dérive le long de la côte, les sédiments et autres matériaux érodés à un endroit peuvent servir à maintenir une plage à un autre endroit. Les plages sont donc continuellement remodelées. Tous ces processus créent également des habitats pour la faune et la flore, contribuant ainsi à maintenir l'équilibre de l'écosystème côtier.
Le taux ou la vitesse d'érosion dépend de facteurs tels que le type de roche, de sol, le climat et les vagues, la végétation et la forme de la côte. Les activités humaines, telles que la construction près du rivage et l'enrochement pour protéger les propriétés, peuvent également affecter ce processus naturel et parfois perturber les écosystèmes.
Nos pages Dune en santé et Zone côtière et dunes permettent de mieux comprendre la dynamique du milieu côtier et des processus tels que la dérive littorale qui contribue au déplacement des sédiments.
La laisse de mer : essentielle à la vie des plages
Les plages ont des caractéristiques communes, dont l'accumulation d'algues, d'herbes marines et autres éléments naturels laissés par les marées, appelée « laisse de mer », qui joue un rôle important dans la santé de l'écosystème côtier. On peut y trouver des herbes marines, des algues, du bois flotté, des coquillages et des carapaces de crustacés dispersés sur la plage ou déposés dans une ligne parallèle à la mer.
Préserver la laisse de mer favorise la biodiversité et la résilience naturelle de nos plages, des milieux vivants qui se transforment avec les vents, les courants et les marées.
La laisse de mer forme un habitat important qui joue un rôle clé dans le fonctionnement écologique des hauts de plage et des dunes. Elle est essentielle à la biodiversité, car elle constitue un habitat riche pour diverses espèces comme des insectes et des petits invertébrés. Cela fait qu’elle est aussi une source de nourriture pour de nombreux oiseaux.
La laisse de mer joue aussi un rôle clé dans la stabilisation du sable, la croissance des plantes et la réduction de l’érosion. En gardant la laisse de mer sur les plages, on favorise la diversité de la chaîne alimentaire et on maintient la résilience naturelle de la plage, ce qui contribue à la santé générale du littoral.
En plus des marées, les vents transportent les éléments naturels de l'environnement, tels que les feuilles et les plumes d'oiseaux, qui s'accumulent dans la laisse.
La laisse de mer retient aussi le sable lorsque celui-ci est déplacé par les vents. Ceci est important pour la formation des dunes.
Avec le temps, la laisse de mer va se décomposer, libérant des nutriments qui serviront de nourriture aux plantes qui poussent au pied de la dune. À leur tour, ces plantes retiendront le sable et permettront à la jeune dune de se former.
La zostère, une herbe marine et non une algue
La zostère est une plante marine qui pousse dans les eaux peu profondes et forme des herbiers sous-marins. Ces herbiers jouent un rôle crucial en tant qu'habitat pour de nombreuses espèces marines, comme les poissons et les crustacés. Ils servent de pouponnière, de garde-manger et d'abri pour de nombreux organismes qui forment la base de la chaîne alimentaire de nos côtes.
En plus de favoriser la biodiversité, la zostère contribue à réduire la force des vagues, limitant ainsi l’érosion côtière. Lorsque les tempêtes arrachent ces plantes, elles sont transportées sur les plages par les marées pour former la laisse de mer.
Les herbiers de zostère servent de pouponnière, de garde-manger et d'abri pour des poissons et de nombreux organismes.
Une bonne partie de la laisse de mer est composée de la zostère, une herbe marine qui pousse dans l’eau le long des côtes. Les vents forts et les marées les arrachent des fonds marins et une fois déposé par les marées, elle vient sécher sur la côte.
Les plantes de la zone côtière
Les plantes côtières sont très répandues sur les plages et les dunes de sable parce qu'elles sont spécialement adaptées pour survivre dans des conditions difficiles. Ces environnements ont un sol pauvre et sablonneux qui retient peu l'eau, contient peu de nutriments et connaît de fréquentes périodes de sécheresse. Les plantes côtières sont également exposées au sel de la mer, qui est nuisible à la plupart des autres plantes.
Malgré cela, de nombreuses plantes prospèrent grâce à des adaptations uniques, par exemple des racines profondes pour accéder à l'eau et des feuilles cireuses ou succulentes qui conservent l'humidité et tolèrent les conditions salines. Des plantes telles que l'ammophile et d'autres espèces indigènes, aident à stabiliser les dunes en ancrant le sable grâce à leur système racinaire, empêchant ainsi l'érosion et le déplacement du sable.
Ces plantes soutiennent également l'écosystème côtier en fournissant un habitat et de la nourriture aux insectes, aux oiseaux et aux petits animaux. De plus, elles contribuent à la beauté et à la santé de la zone côtière.
En voici quelques unes :
Avec ses propriétés stabilisatrices, l’ammophile à ligule courte (Ammophila breviligulata) permet au sable de s’accumuler car ses rhizomes (racines) forment un épais tapis qui retient le sable. Elle est donc essentielle au maintien des dunes. Cette plante est utilisée dans les projets de restauration des dunes. (photo: Nature sud-est)
La caquille édentulée (Cakile edentula) est une plante pionnière qui retient l’eau. Cette plante aide l'ammophile à s'installer. C’est aussi l’une des seules plantes qui pousse entre la ligne de marée haute et la fin de l’aire affectée par les tempêtes (Fleurbec, 1985). (photo: Nature sud-est)
Plante relativement rare, l’hudsonie tomenteuse (Hudsonia tomentosa) est un arbuste très bas et délicat qui pousse sur la dune fixée. Sa floraison est brève mais elle est remarquable (Fleurbec, 1985). (photo: Nature sud-est)
L’élyme des sables (Leymus mollis) pousse sur le sable et aime aussi les graviers et cailloux. On le trouve aussi parfois entre la dune et les marais salés. Peut être transplantée et semée pour restaurer les dunes (Fleurbec, 1985). (photo: Nature sud-est)
Le premier arbuste à s’installer sur la dune mobile, le myrique de pennsylvanie (Myrica pensylvanica) pousse sur les grandes étendues d’ammophiles à ligule courte. Il enrichit le substrat pauvre en éléments nutritifs et nourrit les oiseaux avec son fruit cireux. Nos ancêtres utilisaient la cire des fruits pour faire des chandelles (Fleurbec, 1985). (photo: Nature sud-est)
Les oiseaux de rivage
Les oiseaux de rivage dépendent des plages naturelles et de la laisse de mer, car ils y trouvent une source abondante de nourriture, soit un véritable buffet à volonté! Ce mélange naturel d'algues, d'herbes marines, de coquillages et de matières organiques joue un rôle crucial pour ces oiseaux. Riche en nutriments, la laisse de mer abrite une multitude d'insectes, de petits crustacés et d’autres invertébrés.
Des oiseaux de rivage, comme les bécasseaux et les pluviers, dépendent principalement de ces organismes pour se nourrir, particulièrement pendant les saisons de migration et de nidification. En laissant la laisse de mer intacte, ces plages favorisent des populations d'oiseaux en bonne santé et aident à maintenir l'équilibre fragile des écosystèmes côtiers.
Chaque année, de nombreux oiseaux de rivage migrateurs s'arrêtent sur les côtes du détroit de Northumberland. Ces plages sont des lieux de repos essentiels pour ces oiseaux qui parcourent des milliers de kilomètres lors de leur migration. Ces haltes sont essentielles à leur survie, car elles leur permettent de se nourrir et de refaire le plein d'énergie avant de continuer leur voyage vers le sud.
Déclin des populations d’oiseaux
Les données sur les populations d'oiseaux collectées sur plus de 50 ans montrent un net déclin du nombre d'oiseaux, y compris ceux qui visitent nos plages. C'est pourquoi il est si important de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les protéger.
Ce rapport publié en 2024 par Oiseau Canada et Environnement et changement climatique Canada intitulé L'état des populations d'oiseaux du Canada présente l'état actuel des populations d'oiseaux et leur évolution au fil du temps, et indique ce que nous pouvons tous faire pour aider les oiseaux présents au Canada. Une des sections montre les chiffres pour les oiseaux de rivage.
En respectant leur présence et en évitant de les déranger, nous aidons ces oiseaux à réussir leur migration, tout en protégeant l'équilibre fragile des écosystèmes côtiers.
Quelques espèces d’oiseaux de rivage communs sur nos plages
Chevalier semipalmé (Tringa semipalmata)
Pluvier semipalmé (Charadrius semipalmatus)
Goéland à bec cerclé (Larus delawarensis)
Bécasseaux sanderlings (Calidris alba)
Chevalier grivelé (Actitis macularius)
Les bonnes pratiques des amateurs de plage
Les plages sont des zones vitales pour la biodiversité et des endroits idéaux pour profiter de la beauté de la côte. En minimisant notre impact lors de nos visites, nous contribuons à protéger les habitats des plantes et des animaux qui y vivent.
Vision H2O poursuit ses efforts pour sensibiliser les amateurs de plage à l’importance de protéger cet écosystème côtier.
Voici quelques bonnes pratiques pour des plage en santé :
Regardez, ne prenez pas - Laissez les coquillages, les cailloux et le bois flotté sur place. Ils servent d'abris et de sources de nourriture à de nombreuses espèces, y compris les insectes et les oiseaux.
Restez sur les sentiers et le sable - Utilisez les sentiers désignés et restez sur le sable plus près de la mer pour éviter d'endommager les plantes et les herbes des dunes. Ces plantes contribuent à la stabilité de la plage et à la vie de la faune et de la flore.
Évitez les feux sur la plage - N’oubliez pas que le bois de grève abrite de petites créatures et contribue à maintenir le sable en place.
Ramassez tous les déchets - Rapportez tout ce que vous avez emmené, ne laisser aucune trace : emballages de nourriture, canettes, bouteilles, tous les déchets. Si vous voyez des déchets, pensez à les ramasser pour aider.
Respectez la faune - Observez les oiseaux et les autres animaux de loin, évitez de les nourrir et tenez-vous à bonne distance des zones de nidification pour leur laisser de l'espace.
Tenez votrechien en laisse - Pour la sécurité de tous, y compris de la faune, tenez votre chien en laisse afin qu’il ne risque pas de déranger les oiseaux, les petits animaux et les plantes fragiles. Surtout, pensez à ramasser les excréments de votre animal.
Attention aux feux d’artifice - Pensez à éloigner les feux d'artifice de la côte, en particulier près des zones de nidification.
Bien comprendre le « nettoyage » des plages
Les déchets comme le plastique et les emballages s’accumulent dans la laisse de mer. Il est donc préférable de nettoyer manuellement les plages en retirant uniquement les déchets non naturels.
Lors des activités organisées de nettoyage des plages par la population, on pense parfois à tort qu'il faut « nettoyer » tout ce qui se trouve sur le sable. Et oui, malheureusement, des déchets comme le plastique, le verre et les emballages finissent aussi sur nos plages, et se mélangent à la laisse de mer.
Il est important de ramasser ces déchets, mais les éléments naturels comme les algues, la zostère et les coquillages doivent être laissés sur place, car comme expliqué plus haut, ils font partie de l'écosystème côtier.